Chaque mois, retrouvez le parcours de femmes passionnées et convaincues, découvrez leur méthode de management, leur avis sur l’égalité pro et par-dessus tout l’engouement pour le métier qu’elles exercent. Ce mois-ci, rencontre avec Christine Montecot, « Assistante Directeur d’opération délégué » à l’Infra.
Je m’appelle Christine MONTECOT et je travaille au pôle maîtrise d’ouvrage mandatée Bretagne comme « Assistante Directeur d’opération délégué ».
J’assiste mon hiérarchique, mandaté par RFF, sur les gros projets d’infrastructure dont il a la charge, pour ce qui est du suivi de ces projets notamment vis à vis de la maîtrise d’œuvre (l’ingénierie SNCF) et du suivi des marchés travaux, ainsi que pour le suivi financier et les interfaces techniques externes.
Quel a été votre parcours ?
Après un DEA de transport et logistique et un bref passage dans le privé, je suis entrée au Conseil régional de Bretagne où j’ai passé 6 ans comme chargée d’études sur les projets d’infrastructure et sur le TER. Cette expérience m’a fait découvrir le monde ferroviaire.
Recrutée par la SNCF comme Jeune Cadre Infrastructure Transport en 2003, j’ai par la suite occupé les fonctions de DPX Régulation, puis de RDUO Escale et de DPX Centre Opérationnel Voyageurs à Rennes. J’ai toujours eu dans l’idée d’occuper un poste à l’Infra Maintenance ou Travaux, envie que j’ai enfin concrétisée au début de cette année.
En quoi consiste votre métier ?
J’ai été spécifiquement recrutée pour suivre le projet de Pôle d’échanges multimodal de Rennes. Je suis chargée de lancer et d’animer une démarche participative validée par la Direction régionale dont le but est d’anticiper l’impact des quatre ans de travaux de ce projet sur toute l’exploitation de la gare de Rennes. En parallèle, je suis trois autres projets d’infrastructure (une suppression de passage à niveau et deux projets rennais : le raccordement de la LGV et un plateau de garage voyageurs).
De quoi êtes-vous la plus fière concernant votre métier ?
Je suis fière de ne pas avoir lâché mon rêve vieux de 10 ans d’intégrer les travaux. Fière aussi que mon expérience assez peu courante présente un intérêt pour l’Infra. Je suis surtout fière de la confiance qui m’entoure aujourd’hui : celle de mon dirigeant vis-à-vis d’un projet de cette importance, et celle des nombreuses personnes avec lesquelles je travaille alors même que mes compétences techniques sont encore en grande partie à acquérir.
Vous avez mené votre carrière dans un univers masculin. Comment vit-on le fait d’être une femme parmi les hommes ?
Cet univers masculin, je le vis depuis mon premier entretien d’entrée à l’IUT Transport de Lille, depuis mes 17 ans : « Vous vous voyez, vous là, face à des routiers, à leur donner des ordres ? ». « Oui Monsieur, je me vois ». Parce que tout simplement je ne voyais pas le problème posé par sa question. Je n’imaginais pas qu’être une femme ou un homme puisse avoir une quelconque importance. Ma réponse, qui a paru forte, était en réalité très naïve et reflète bien ce que je ressens encore dans ces univers masculins : la « normalité », c’est-à-dire la mixité, doit être la norme, l’intégrer profondément aide à la faire passer au quotidien, par son attitude et son discours.
Au sein de SNCF, je suis tombée sur des DRH, DPX, DUO, des hommes pour lesquels le fait d’être une femme ne semblait pas constituer un problème.
Cependant, j’ai peu à peu découvert que j’avais de la chance et que tout bien regardé, les femmes n’étaient pas assez nombreuses autour de moi.
Avez-vous des méthodes particulières pour manager les effectifs masculins ?
Mes rapports avec les hommes, que ce soit dans le management fonctionnel ou hiérarchique, sont pour moi assez faciles. Je pense user d’écoute, d’intérêt, de respect, d’humour aussi…et de naturel.
On s’aperçoit assez vite que l’ordre de base, l’impératif sec, ne passe pas bien d’une femme à un homme. Les ordres donnés, ou les conflits quelque fois, passent par l’explication, par le dialogue, par l’analyse des blocages de l’autre. Et par l’écoute de soi aussi.
Certaines personnes ne prennent pas toujours bien qu’une femme exprime une autre manière de voir les choses et surtout qu’elle les exprime. C’est là la limite que je mets au dialogue. Mon intransigeance est là : femme = homme = humain (dans l’ordre que l’on veut !).
Comment s’imposer en tant que femme dans un univers majoritairement masculin ?
Je ne me suis jamais vraiment posé cette question. Pour moi, fondamentalement, il n’y a pas de raison de faire une différence.
Je fais en revanche assez attention à ma tenue, à mon comportement, que j’essaie d’adapter aux situations. L’essentiel je pense est de paraître adaptée à la situation (type de réunion, chantier, bureau, position hiérarchique…).
J’essaie de coupler respect et intolérance aux comportements « déviants ». Le non verbal est très fort, peut être encore plus dans les relations hommes/femmes.
Finalement, depuis 10 ans à la SNCF, je n’ai connu que très peu de situations problématiques dans ce domaine.
Y a-t-il des femmes au sein de vos équipes ?
Que ce soit dans mes équipes ou dans mon entourage professionnel, il y a toujours une part, même faible, de femmes.
J’essaie de les valoriser en terme d’image : je suis toujours contente d’en rencontrer et je le montre, à l’agent et à son hiérarchique, pour que la prise de conscience des hommes se fasse aussi vis-à-vis de leur trop faible nombre.
Je les encourage à poursuivre, à passer les examens, mais aussi à ne pas passer sur les « détails » du machisme ordinaire. Les hommes ne sont pas tous conscients de leurs comportements parfois limites envers les femmes.
Quels conseils donneriez-vous à une femme qui souhaite progresser dans votre domaine ?
Chacune de nous dans ces métiers, chacune qui progresse, y arrive parce qu’elle est elle-même et donc différente.
Mais je pense tout d’abord qu’il faut avoir envie. Et puis ne jamais s’oublier, toujours s’écouter et être soi en refusant les stéréotypes que la société nous renvoie.
Je pense ensuite qu’il faut être attentive à tout, à tous les « détails », et qu’on gagne aussi le respect des hommes à ne rien laisser passer. Je dis à mes enfants : « Quand ça te paraît bizarre, quand un sentiment de malaise te vient, c’est que quelque chose n’est pas normal. Il faut dire non ». A leur âge, je leur dit que « Non » c’est partir, se sortir de la situation. Dans le monde professionnel, « Non » c’est affronter, c’est oser.
Comment pensez-vous qu’un réseau de femmes puisse représenter un levier pour faire avancer la parité ?
La parité, c’est « juste » juste. C’est « juste » remettre le curseur au bon endroit, pour qu’hommes et femmes vivent mieux. SNCF AU FEMININ, comme les autres réseaux de femmes, contribue à créer la parité et au-delà, à étendre l’humanisme.
Notre réseau peut diffuser parmi les femmes la nécessité de se prendre en main.
En étant ouvert aux hommes, le réseau diffuse la compréhension que les deux moitiés de l’humanité ne peuvent vivre bien dans le stéréotype et la négation, masculine ou féminine.
Pour les hommes aussi, ces réseaux sont un outil de liberté, celle de pouvoir choisir leur vie en fonction de leurs souhaits et non de ce que la société attend d’eux.